Moment de repos [Sam Cooper]

Edith se trouvait face à l'ascenceur, ce même ascenceur qui fonctionnait une fois tout les trente six du mois. Elle le savait mais c'était plus fort qu'elle, elle tentait toujours sa chance, un jour elle le battrait. Bien sûr au fond d'elle, elle savait que ce petit jeu était stupide. On ne bat pas les machines de l'Etat. Elle ne fonctionne pas un point c'est tout.
Elle devrait s'y être fait à toutes ces photocopieuses, ascenseurs, machines à café, agrapheuses, imprimantes et matériels en tout genre qui faisait constament des siennes.
On aurait pu penser que le FBI était bien équipé, mais non, ce n'était qu'une façade, un leurre pour faire croire au gens à une machine bien huiler. Oh bien sûr il y avait des machines qui fonctionnaient, les ordinateurs étaient plutôt pas mal mais le reste à moins d'être très haut placé il ne fallait même pas espérer un petit quelque chose de silencieux, rapide et fonctionnel. Mais au final même si tout le monde s'en plaignait, ils savaient tous que c'était les joies du public et sans se l'avouer si tout était remplacé par du neuf le lendemain tout le monde aurait un petit pincement au coeur pour cette photocopieuse qu'il faut frapper par dessus, bousculer sur la droite et tenir sur la gauche pendant qu'elle travaille.
L'ascenceur n'arrivait toujours pas, alors abandonnant son petit rituel Edith se dirigea vers la porte d'à côté. Les escaliers. Elle ne savait pas les monter tranquillement, à la place elle se mit à courir, avalant les marches les unes après les autres sous ses pieds. Arrivé trois étages plus haut elle poussa la porte et commença à avancer dans le couloir qui se présentait face à elle.

Elle se dirigea machinalement vers son bureau, traversant le long couloir illuminé grâce au jour que laissait passer les portes des bureaux entrouverts. Il fallait toujours être prêt pour partir.
Une fois face à la porte de son bureau elle hésita une seconde. Elle n'avait rien d'urgent à faire. Ses rapports étaient bien imprimés, soigneusement rangés et le seul dossier qui l'attendait vraiment était celui de Sam Cooper.
Sam Cooper. Un sourire naquit au coin de ses lèvres, sa meilleure prise mais aussi l'enquête de sa vie. Enfin pour le moment. Elle comptait bien en finir le plus rapidement possible avec cette enquête, mais en même temps une partie d'elle lui disait le contraire. Elle aimait ce jeu du chat et de la souris. Sam Cooper était le seul vrai adversaire qu'elle n'ai jamais eu. Elle pouvait passé des heures à consulter son dossier, à chercher les moindres preuves, les moindres irrégularitées qui lui indiquerait son prochain coup. Elle aimait s'y plonger et ne plus en sortir. Cela stimulait son esprit et réveillait son instinct de compétition.
Elle s'approcha encore un peu plus de la porte de son bureau mais au dernier moment elle changea d'avis. Elle avait bien le droit à une pause elle aussi. Elle avait soif et avait besoin de sa dose de café régulière le temps de s'aérer le cerveau et de retourner l'esprit au clair devant le dossier Sam Cooper.

Elle continua donc d'avancer vers la salle de repos de l'étage. Salle de repos était un bien grand mot, il y avait juste quelques chaises soit disant plus confortables qu'une simple chaise, une machine à café, un mini frigo et deux trois trucs en plus apporté par des collègues.
Elle vérifia que le café était encore chaud, s'en versa une tasse dans une tasse noire FBI. Elle avait sa propre tasse dans son bureau mais elle n'avait pas envie d'aller la chercher. Celle-là semblait propre, ça lui allait très bien.
Elle s'assit dans un siège prenant le journal face à elle et commença à le feuilleter alors que les bruits de bureaux se faisait entendre comme un essaim d'abeilles au travail.

Aujourd’hui n’était pas un jour vraiment comme les autres. Ce qui allait se passer était même… Inhabituel. Voilà qui allait surprendre plus d’un agent du respectable FBI… Sam Cooper, hacker renommé, soupçonné, condamné et suspecté de réitérer ses crimes, se rendait avec la plus grande tranquillité et nonchalance du monde tout droit au quartier même de ceux qui surveillaient ses moindres faits et gestes. Etonnant non ? Certains parleront d’attitude suicidaire. Pas faux. Sauf que ces personnes ignorent une partie importante de l’affaire : il ne se rend pas de son plein grès retrouver ses amis inspecteurs. Non, il y est au contraire ‘obligé’ pour remplir quelques dossiers, signer des papiers sans valeurs, mais qui lui rendront néanmoins sa citoyenneté, pas rien non plus. Sorti de taule récemment, après quatre longues et terribles années enfermé dans la plus misérable prison qu’on avait pu lui trouver, Sammy allait enfin retrouver ses pleins droits. Enfin… Il se sait épié et traqué, mais qu’importe, il aurait bientôt de nouveau sa couverture de citoyen, une maigre protection mais non négligeable. Un semblant de neutralité, même si son casier était quant à lui bien garni, les 800 millions ayant fait couler de l’encre…

Une fois dans la gueule du loup, on le reconnaitrait surement. Normal, il en avait fait chier quelques-uns… Et c’est pas fini. Quoi ? Qui croirait franchement que Sam Cooper allait se ranger sagement ? Soyons sérieux… Il avait la plus stricte interdiction de s’approcher d’un ordinateur. Mais toutes les personnes s’étant penchées sur la question savent très bien qu’il était inconcevable qu’il obéisse. Instantanément ou dans des jours, des mois, quoiqu’il en soit… Il fera ce qui lui plaît de faire. Tant pis pour les conséquences. Il est désormais prévenu, mieux armé, il a vécu dans des cellules froides… Et il ne veut plus jamais y retourner. Le nécessaire sera fait. Mais cela ne veut absolument pas dire qu’il va arrêter son action… Seuls les utopistes bornés peuvent croire une chose pareille. Bref, le FBI entendrait encore parler de lui, mais pas directement, en sachant pertinemment qu’il attaque… Mais sans avoir de preuves. Frustrant. Celle qui le suit et le connaît sans doute le mieux est Edith Sirvel, agent émérite de l’organisation, qui rêvait surement de le remettre au trou… Ses sentiments pour elle ? Pas besoin d’être devin pour imaginer qu’il ne l’adore pas, enfin, pas personnellement. Il n’a aucune connaissance ou presque de la femme, mais de l’Etat qu’elle représente et qui veut sa peau. C’est suffisant pour le moment. Pourtant… Il sait qu’elle a fait son job. Exécuté son rôle. Et lui de même, il a explosé le système car c’était ce qu’il devait faire. La seule nuance les distinguait par les retombées… Sam avait perdu. A cause d’un traitre, mais il s’en foutait de ça, l’unique pensée détestable qui occupait son esprit en se rappelant ces évènements était qu’il avait échoué. Pas entièrement certes, car l’argent avait été pris, le casse s’était parfaitement déroulé…
Mais ça avait foiré au final. Un coup pour rien.

Pas tranquilles et mesurés, une attitude légèrement nonchalante, visiblement peu troublé d’être parmi ses ennemis, Sam traversa le hall d’entrée du FBI jusqu’à l’accueil avec une décontraction troublante. Il donna son nom, on lui répondit avec une voix angoissée que la personne qui s’occuperait de lui était au troisième étage, et qu’il la trouverait en salle de repos. C’était un homme, dont il n’avait pas pris la peine d’écouter le nom, qui serait malheureusement en retard selon l’hôtesse… « N’hésitez pas à vous servir un café en patientant monsieur… » Très charmant, merci, ça va être joyeux. Tu grimpes sans un bruit, ne tentant même pas de prendre l’ascenseur, Gabriel te disait souvent qu’il ne marchait jamais… Un long couloir que tu as déjà traversé par le passé, tu passes devant des salles ouvertes où on te regarde parfois curieusement, certains doivent avoir déjà vu ton visage, ou c’est simplement ton anneau à l’oreille et ton air rebelle qui les intriguent. Bien vite tu es devant la salle indiquée, entre sans faire attention à ceux déjà présents… En l’occurrence, celle. Ce n’est qu’une fois au milieu de la pièce que tu la remarques, elle, assise dans un des sièges, une tasse et un journal près d’elle, Edith Sirvel. Tu l’as reconnu avec une facilité déconcertante, on n’oublie pas facilement la personne qui vous a envoyé à votre perte… Brune aux yeux bleus, un visage plus doux qu’autre chose, qui pourrait deviner… Il n’y a pourtant aucune animosité dans ton regard, au contraire tu paraitrais même… Amusé.

Tu n’as déjà aucune raison de t’en faire. Tu es dans ton bon droit Sam Cooper, rien à te reprocher, ou du moins rien qu’elle ne puisse te reprocher, elle n’est pas en mesure de fournir quoique ce soit contre toi, tu en es intimement persuadé. Peut-être pas en position de force, mais pas loin. Rien dans ton attitude qui pourrait te porter préjudice. Les bras le long du corps (si tu les avais dans tes poches, tu pourrais être soupçonné d’avoir une arme), l’air serein (si tu étais agité, c’est que tu aurais quelque chose à cacher), tu es irréprochable. Seul ton regard pétille, une lueur au fond des prunelles qui laisse penser que quelque chose te titille l’esprit… Mais qui pourrait le dire ? Tes lèvres aussi, à peine étirées dans un sourire en coin… Surprenant comme attitude vue la situation. Un homme normal lui aurait déjà sauté au cou pour l’étrangler, après tout, tu sors à peine de taule et t’y as été en partie à cause d’elle. Quelle importance ? Oh si peu, ce qui est fait est fait, ce n’est qu’un jeu, elle a gagné la première manche… Toute ta vengeance n’est portée que sur un seul homme. Edith recueille plutôt… Ta curiosité. Et tu comptes bien continuer à jouer face à cette adversaire prometteuse. Tu as de toute manière du temps à tuer, et cette rencontre providentielle attise des sentiments multiples, divers et opposés en toi… Tu aimes les défis et est suffisamment opaque, patient, pour tenir un échange même s’il s’avérera peut-être tendu…

« Le hasard fait bien les choses… Comment ça va au FBI, depuis le temps ? »

Avec ces mots, tu t’es dirigé jusqu’à un fauteuil en face de la jeune femme, t’installant confortablement sans la lâcher du regard… Ton intonation était naturelle, même si un fond de froideur était décelable… Normal lorsqu’on remet les mots dans leur contexte. La dernière fois qu’il l’avait vu, c’était à son procès… Cette phrase anodine prend alors une tournure cynique, effrontée, peut-être un poil provocante. Effet voulu ? Possible… Difficile de savoir ce qui se passe dans la tête de Sam Cooper.

Edith entendit quelque entrer dans la salle de repos mais n'y prêta aucune attention bien trop concentrée sur un article d'une affaire en cours. Ce n'était aucun de ses dossiers mais cette affaire de meurtre la passioner. Il y avait quelque chose d'étrange et de très attirant dans les méthodes du tueur. Elle aurait pu demander à intégrer l'équipe en charge mais c'était plutôt une solitaire, elle n'appréciait pas tant que ça les équipes nombreuses. Trop de personnalités, de méthodes, de points de vue différents.
L'homme qui était entré se mit à parler et c'est alors qu'elle leva la tête des mots pour regarder le nouvel arrivant.
Sam Cooper.
Elle avait reconnu sa voix mais elle voulait vérifer. Être sûre que Sam Cooper était bel et bien là. Elle lui sourit narquoisement appréciant l'ironie de la situation. Il devait être là pour quelques soucis administratifs, qu'elle aurait aimé envenimer, puisqu'il ne portait pas de menottes et n'était pas encore suicidaire à sa connaissance.

Sam, dit-elle le plus posément du monde. Désolé de me présenter à toi dans cette tenue, dit-ellel amusé en pensant à la dernière fois qu'elle avait vu son visage pour de vrai.
C'était lors de son procès lorsqu'elle avait témoigné puis lorsqu'elle l'avait regardé partir en prison. Au tribunal elle ne portait pas de jean et de chemise noire. Non au tribunal il fallait faire bonne effet face au juge, aux jurés, à la presse. Elle avait donc mis un tailleur, fait quelque chose de ses cheveux qui à l'instant se contentait de retomber souplement sous ses épaules en formant de légères ondulations. De cette façon elle ressembalit à tout le monde, c'était une inconnue de plus. Alors que les tailleurs spécial tribunal haussait le niveau d'apparence, la faisait entrer dans d'autres mondes, d'autres cercles.

Alors quoi de neuf ? Quel plan de braquage, d'arnaque prépare-tu ?

Elle lui posa la question tout en sachant qu'il ne lui répondrait pas, mais ça l'amusait de jouer avec lui. A cet instant elle ne pouvait rien faire d'autre. Il était intouchable et même si cela l'énervait plus que tout, la faisait bouillonner elle n'en montrerait rien. Elle n'allait pas lui offrir ce plaisir là. Elle se contenta d'agir le plus naturellement possible, comme deux amis de longues dates qui ne s'étaient pas vu depuis longtemps et rattrapaient le temps passé.

Quel dommage… Elle ne répondit pas à sa question portant sur les nouvelles de la vénérable organisation qu’est le FBI. Les choses étaient-elles aussi ennuyantes et monotones qu’il le pensait pour que cela n’en vaille même pas la peine d’en parler ? Fort possible. Une vie basait sur le désir de briser celles des autres devait avoir quelque chose de palpitant au début, avant de lasser. Même la mort et le désespoir s’effritent avec le temps. Seule la haine semblait faire quelque peu exception, et encore, ça devait aussi finir par passer. L’Amour peut-être… Voilà un autre sentiment difficile à cerner, portant à confusion. Edith éleva enfin la voix en même temps qu’elle posait ses yeux sur lui. Plutôt que de parler du lieu pour lequel elle bossait, elle choisit d’évoquer… Sa tenue. Un semblant de politesse qui arracha un sourire à Sam, c’était une phrase qu’il aurait plutôt vu destinée à un supérieur, un amant, un ami, mais certainement pas à l’homme qu’elle voulait remettre en taule… Lui, en l’occurrence. Elle arborait jean et chemise noire, tenue classique en soit, il chercha vaguement du regard le badge du FBI qui devait normalement briller fièrement sur sa poitrine, cet insigne qui avait toujours eu plus ou moins tendance à le dégoûter qu’autre chose. Il ne s’y attarda que peu, soufflant d’un air absent : « Moi qui m’attendais à une combinaison de cuir… Quelle déception. »

Sam se moquait bien des conventions, de ce qui est à dire et ne l’est pas, aussi ces mots s’étaient échappés avec naturel, sans demi-mesure. Notre hacker respectait sa place, seulement la hiérarchie qu’il s’était fixée ne correspondait pas à celle établie par la société. En haut de la sienne, Gabriel Lancaster tenait une place importance, c’était le Boss après tout. Rachel occupait une place toute aussi prédominante -officiellement en tout cas, officieusement elle tenait un rôle bien plus grand-, quoique la nature différée. Et cela restait du respect, la soumission ne faisait pas partie de son monde, et si par malheur elle l’atteignait, c’était contre son gré et il s’y pliait avec la plus grande des peines. Comme lorsqu’il avait fallu se rendre pour préserver les autres. Se soumettre pour une cause suffisamment primordiale pour que le reste paraisse… Supportable.

Elle lui posa alors la fatidique question qui, même si c’était naïf de croire qu’il y répondrait de manière juste, avait le mérite de montrer qu’elle jouait. Alors ainsi, ce serait à ce celui qui fera craquer les nerfs de l’autre le premier ? Soit… Sam avait été entrainé au trou, à ravaler sa rage et ses envies sanglantes. Mais il aurait été très impoli de sa part de ne rien dire… Et puis, ce n’est pas son genre de se taire, même lorsqu’il se sait en terrain ennemi. Ce n’est alors que plus amusant.

« C’est frustrant j’imagine… De savoir parfaitement qu’il se trame quelque chose, sans en connaître les détails. » Il avait dit cela d’un ton évasif, le regard perdu sur un détail que seul lui s’attachait à voir, il paraissait absorbé par une mèche de cheveux de la jeune femme, mèche qui pourtant n’avait rien de particulier… Allez savoir à quoi il pensait, mais Sam avait l’habitude de fixer un point défini. « Mais tu auras bientôt quelque chose à te mettre sous la dent, à moins que l’attente ne soit trop dur pour toi. » Une touche légère de provocation. Bien qu’il ne le savait pas de façon sûre, Sam se doutait qu’elle avait du passer quelques…Heures, peut-être même plus, à étudier son cas pour déceler la moindre faille. Ce pourquoi il avait à l’instant une attitude impeccable et y portait attention. Pas un mot plus haut que l’autre. Et ces deux derniers prononcés ses yeux dans les siens « J’espère que non… » Il serait dommage qu’un autre agent prenne en charge son dossier, la transition prendrait du temps, et l’affaire s’éterniserait… Ce serait ennuyeux que le challenge s’arrête là. Et puis, Edith était intéressante humainement à croire ce qu’il avait vu. Pactiser avec l’adversaire ? Oh, n’exagérons rien…

Il se releva alors avec flegme pour se diriger lentement vers la machine à café, on lui en avait donné « l’autorisation » alors autant en profiter… Ce café ne ruinerait pas l’Etat certes, mais c’est une petite goutte de plus qui finirait par assécher les caisses. Sam a tendance à voir… Très loin xD Arrivé à l’engin, il l’enclencha méthodiquement, son esprit le voulait… Puis tout aussi tranquillement, il se mit à parler d’un thème pour le moins ambigu, à deux tranchants… « J’aime beaucoup la Justice de notre pays… On met quelqu’un entre quatre murs avec l’espoir secret qu’il en crève, puis on le relâche en avance… » Vous commencez à entrevoir la complexité de ce qu’il laissait apercevoir ? Il évoque un cas général… Qui lui est étonnamment proche et familier. « Parce qu’il a été ‘sage’ et a promis le plus hypocritement du monde que jamais, oh non jamais plus, il ne recommencerait… On le laisse par obligation, en attendant patiemment la première erreur commise pour le mettre enfin sur la chaise… » Sam semblait détaché, distant de ce qu’il évoquait, mais pourtant sa voix était dure et sans appel, comme prononçant une sentence irréfutable. « Et s’il ne se décide pas à mourir gentiment, on l’y aide un peu, en le poussant au crime ou en inventant quelques preuves, après tout… » Il se retourna alors avec douceur vers la jeune femme, tenant entre ses mains la boisson dans une tasse ‘FBI’, un tableau qui avait quelque chose d’ironique au possible… « Qui s’en soucie ? » Un sourire narquois se dessina sur son visage qui venait de prendre un air particulièrement froid, mais redevint bien vite normal pour prendre un ton légèrement amusé, entendu : « Mais tu connais la formule aussi bien que moi, Edith. »

Sam avait décidemment l’art et la manière de tout tourner pour présenter l’absurde. Ainsi il se mettait hors de cause tout en accusant avec fermeté, il n’est pas du genre à faire de cadeau, bien que tout restait assez cordial, toujours. Il revint s’asseoir en face d’elle avec la même nonchalance et bu une gorgée avant de repousser la tasse sur la table… Pour de nouveau planter son regard dans le sien, sans détours et dire sans qu’il soit possible de savoir s’il plaisantait, ou non… Imperturbable, un sourire en coin. « Si seulement tu pouvais t'étouffer avec ton croissant... Je t'en serais redevable. » Hum Sam… Tu y vas un peu fort là non… Ton sourire s’agrandit alors que tu enchaines sur un ton plus qu’adorable, comme un bon ami qui vient de lancer une petite pique : « Tu ne l’as pas mal pris pas vrai ? Ma grande amie… Tu sais bien à quoi t’en tenir avec moi, comment pourrais-je penser un mot de tout ça ? » Un jeu, rien de plus. Un entremêlement compact d’attaques et de légèretés qui s’emboitaient parfaitement, comme si cela avait été bien prévu et planifié, alors qu’il n’en était rien. Dans quel but ? Il était tout aussi indiscernable que son comportement. Intouchable.

Edith sourit à sa remarque sur sa tenue vestimentaire. Sam avait beau être un criminel qui serait toujours recherché il n'en avait pas moins un certain sens de l'humour et discuter avec lui en faisant semblant de bien s'aimer était un vrai régal. Cela arrivé à calmer quelque peu Edith qui n'avait qu'une envie : sortir son arme et ramener Sam tout droit d'où il venait : en prison. Mais comme elle ne le pouvait pas, jouer n'était pas plus mal.

Oh je suis désolée, dit-elle dans une fausse moue d'excuse, il y a eu une tâche dessus hier... J'ai du l'amener au lavage et je n'ai donc pas pu arborer ma combinaison de cuir aujourd'hui. Cela dit tu m'aurais prévenu que tu venais j'aurais fait un effort rien que pour toi, dit-elle malicieusement. La prochaine fois tu n'as qu'à me dire où tu vas et je viendrais tout en cuir.

Elle n'était bien sûr pas en train de le draguer, bien loin de là. Cela ne lui serait jamais venu à l'esprit. Elle se contentait de passer ses nerfs sur la conversation tout en restant très légère et ne montrant aucune trace de son agacement bien qu'elle se doutait que son adversaire savait à quel point elle fulminait en cet instant. Ils se connaissaient beaucoup plus qu'ils ne l'auraient jamais souhaité. Tout ce temps de traque, de poursuite avait inéxorablement mené à une connaissance appronfondi de l'autre.

Il se mit d'ailleurs rapidement à jouer avec ses nerfs en évoquant le fait qu'il préparer sans aucun doute quelque chose mais qu'elle n'en savait rien et qu'à ce stade elle n'avait quasiment aucun moyen de savoir quoique ce soit. Mais Edith resta de marbre, un léger sourire sur les lèvres marquant une détente extérieur qui était loin d'être intérieur. Mais peu importait. Le but du jeu était de ne pas craquer, ne pas lui sauter dessus comme une sauvage et l'attaquer. Elle n'en avait pas le droit. Elle était l'autorité légale, il y avait des lois qui régissaient son monde, des lois officielles qui pour le moment protégeaient Sam qui était malheuresement redevenu citoyen honnête aux yeux de la loi. Intouchable.

Elle le regarda se lever et se servir une tasse de café. Si seulement quelqu'un avait eu l'heureuse idée de mettre un sérum de vérité dedans juste après qu'elle se soit servi une tasse... Elle l'écouta silencieusement parler du système judiciaire. Il n'avait pas entièrement tort, mais en même temps elle n'en avait pas grand chose à faire. Si elle pouvait l'envoyer en prison pour le restant de ses jours elle le ferait sans aucune hésitation. Il se retourna enfin et la regarda d'un sourire narquois qui disparu bien vite.

Ah la justice... Quelle belle notion, n'est-ce pas ? C'est vrai ce n'est pas parfait mais on sait bien tout les deux que tu ne la vois pas du bon côté. Je dirais plutôt que le problème avec la justice c'est qu'elle relâche trop de gens. Quoique dans un sens ça me donne du travail. Elle fit mine de réfléchir. C'est peut-être ça au fond un bon système : un chat et une souris qui se cours sans cesse l'un après l'autre. Le monde serait bien fade sans un peu d'action.

Elle fixa Sam un instant avant de continuer, observant les moindre détails de son apparence. Il n'avait pas changé. Il paraissait toujours le même mais elle savait qu'elle n'arriverait pas à la capturer aussi facilement cette fois-ci. Il était bien plus malin que ça, et si elle l'avait eu au départ c'était plus par une coordination de chances que par autres choses.

Mais bon, on ne va pas refaire le monde.

Elle prit son croissant posé sur une table à côté d'elle et en mordit un bout. Sam la voyant faire lui fit remarquer que ce serait sympa de s'étouffer avec.

Oh je suis désolée Sam de te décevoir ainsi. Pas de cuir, pas d'étouffement au croissant. Quelle mauvaise présentation je te donne aujourd'hui ! Mais tu ne m'en voudras pas trop si je reste encore un peu. Elle lui sourit. Et puis ce serait dommage de gâcher un si bon croissant alors que je n'en suis encore qu'au début. Peut-être que j'envisagerais un étouffement vers la fin. Qui sait ?

Elle se leva et apporta le plat de pâtisseries près de Sam.

Mais toi n'hésite pas à te servir et à me montrer comment exactement je dois faire pour bien m'étouffer avec un croissant.

Elle s'assit de nouveau, but une gorgée de son café qui commençait à devenir un peu trop froid à son goût mais elle agit comme si de rien n'était.
Le silence s'installa pendant que chacun de leur côté ils dégustaient leur "goûter". Elle ne fit rien pour le briser, au contraire elle se laissa aller au flot de ses pensées tout en gardant Sam à l'oeil, continuant son observation poussé de l'ex-prisonnier. Elle essayait déjà de trouver un moyen de l'attraper de nouveau mais cette fois avec de quoi le laisser en prison pour bien plus longtemps tout en laissant l'atmosphère de la pièce changeait lentement.
Elle but une dernière gorgée de son café, sa dernière gorgée. Rien n'était plus comme avant. La tension entre les deux étaient plus que palpable.
Elle posa la tasse à côté d'elle, se redressa dans son fauteuil et fixa Sam droit dans les yeux. Elle n'allait pas lâcher son regard.

Je sais très bien que tu vas prépaper un nouveau coup. J'ai fini par bien te connaître après tout. Tu ne vas pas rester dans ton coin tranquille, hein ? Elle posa cette phrase comme une question bien qu'elle n'en attendait pas de réponse.
Ce n'est pas parce que tu es redevenu un citoyen honnête que je vais te lâcher. Rien ne sera comme avant Sam. Je ne te laisserais jamais traquille. Et si ce n'est pas moi ce sera quelqu'un d'autre.

Elle s'adossa à nouveau confortablement contre le dossier du fauteuil tout en continaunt de fixer ses yeux dans ceux de son adversaire. Elle n'en avait pas dit beaucoup mais juste assez pour se faire comprendre et surtout juste assez pour ne pas dépasser la limite autorisée.
Elle sourit gentillement et lui proposa un nouveau café. Arpès tout elle n'était pas censé le menacer. Paraître polie et attentionnée était la première des choses qu'elle avait appris au FBI. Les méchants étaient parfois gentils aux yeux de la loi et elle devait faire avec. Faire bonne figure pour le bureau du FBI même si elle n'en pensait pas moins.

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